Évaluation clinique des dispositifs médicaux selon le RDM : guide étape par étape pour garantir la conformité

Rédigé par Hatem Rabeh, MD, MSc Ing

Votre expert en évaluation clinique

Introduction

Le Règlement (UE) 2017/745 relatif aux dispositifs médicaux (RDM) impose des exigences strictes en matière d’évaluation clinique afin de garantir la sécurité et la performance des dispositifs mis sur le marché européen. Conformément à l’article 61, les fabricants doivent évaluer en continu les données cliniques pour démontrer la conformité aux exigences générales en matière de sécurité et de performance (Annexe I).

Chaque dispositif médical, quelle que soit sa classe de risque, doit faire l’objet d’une évaluation clinique systématique tout au long de son cycle de vie. L’ampleur de cette évaluation dépend du risque, du caractère innovant et de l’usage prévu du dispositif.

Cet article présente un guide étape par étape du processus d’évaluation clinique, des sources de données cliniques, ainsi que du rôle du Suivi Clinique Après Commercialisation (SCAC / PMCF) pour garantir la conformité réglementaire.


Qu’est-ce que l’évaluation clinique selon le RDM ?

L’évaluation clinique est un processus continu par lequel le fabricant collecte, évalue et analyse des données cliniques afin de démontrer la conformité du dispositif aux exigences du RDM. Ce processus vise à garantir :

✔️ Sécurité et performance : Le dispositif fonctionne comme prévu, avec un risque minimal acceptable.
✔️ Justification bénéfice/risque : Les risques résiduels doivent être acceptables au regard des bénéfices cliniques.
✔️ Conformité réglementaire : Le dispositif répond aux exigences générales de sécurité et de performance de l’Annexe I.


Fondements réglementaires et exigences

L’article 61 du RDM impose aux fabricants de :

🔹 Élaborer un plan d’évaluation clinique (PEC) : Définir la portée, la méthodologie et les objectifs cliniques.
🔹 Collecter et analyser les données cliniques : Revue de la littérature, investigations cliniques, données post-commercialisation.
🔹 Réaliser des investigations cliniques : Obligatoires pour les dispositifs à haut risque, sauf si l’équivalence ou des données existantes permettent une exemption.
🔹 Démontrer l’équivalence : Acceptée uniquement si des critères stricts de similitude technique, biologique et clinique sont remplis.
🔹 Mettre en œuvre un SCAC (PMCF) : Mettre à jour continuellement les données cliniques après commercialisation.

Le respect de ces étapes est essentiel pour garantir la conformité réglementaire et obtenir le marquage CE.


Étapes du processus d’évaluation clinique

L’évaluation clinique suit une approche structurée et fondée sur des données probantes, conformément aux exigences du RDM. Elle se décline en quatre grandes étapes :


1. Planification : élaboration du Plan d’Évaluation Clinique (PEC)

Le Plan d’Évaluation Clinique (Annexe XIV, Partie A) constitue la feuille de route pour la collecte et l’analyse des données cliniques. Il doit comprendre :

  • Objectif prévu : Description détaillée des indications, contre-indications, population cible.

  • Bénéfices cliniques attendus : Résultats mesurables démontrant l’efficacité du dispositif.

  • Paramètres de sécurité : Seuils d’acceptabilité des événements indésirables et risques associés.

  • Méthodologie de collecte : Démarche structurée incluant revue de la littérature, études cliniques, justification d’équivalence.

Ce document est évolutif : il doit être mis à jour à mesure que de nouvelles données cliniques deviennent disponibles.


2. Identification des sources de données cliniques

Pour démontrer la conformité au RDM, les fabricants doivent s’appuyer sur des données cliniques pertinentes et fiables issues de plusieurs sources :

📌 Littérature scientifique : Études publiées sur des dispositifs similaires ou équivalents.
📌 Investigations cliniques : Études sponsorisées par le fabricant pour valider la sécurité et la performance.
📌 Rapports de surveillance après commercialisation (PMS) : Données issues des bases d’événements indésirables, registres de patients, utilisation réelle en pratique clinique.

Chaque source doit faire l’objet d’une évaluation critique pour garantir sa pertinence, sa qualité et sa validité scientifique.

3. Évaluation et analyse des données cliniques

Une fois les données collectées, une analyse approfondie permet de déterminer si elles soutiennent la sécurité et l’efficacité du dispositif. Les fabricants doivent évaluer :

✔️ Validité scientifique : Qualité de la conception de l’étude, taille des échantillons et pertinence statistique.
✔️ Pertinence : Applicabilité directe aux indications et à la population cible du dispositif.
✔️ Équilibre bénéfice/risque : Vérification que les risques résiduels sont acceptables au regard des bénéfices cliniques.

Par ailleurs, les performances du dispositif doivent être comparées à l’état de l’art et aux options thérapeutiques alternatives disponibles.


4. Rapport d’Évaluation Clinique (REC)

La dernière étape consiste à compiler les résultats dans le Rapport d’Évaluation Clinique (REC), document fondamental pour l’obtention du marquage CE. Le REC doit :

✔️ Résumer les sources et méthodologies des données cliniques.
✔️ Documenter les résultats en matière de sécurité et de performance.
✔️ Fournir une analyse claire du rapport bénéfice/risque et mentionner les incertitudes résiduelles.
✔️ Décrire les mesures prévues dans le cadre du Suivi Clinique Après Commercialisation (SCAC / PMCF).

Le REC est un document évolutif : il doit être mis à jour régulièrement avec les nouvelles données cliniques pour rester conforme au RDM.


Considérations sur l’équivalence selon le RDM

Les fabricants peuvent utiliser les données cliniques de dispositifs équivalents uniquement si les critères de similitude technique, biologique et clinique définis à l’Annexe XIV sont rigoureusement respectés :

🔹 Équivalence technique : Conception, matériaux et principes de fonctionnement similaires.
🔹 Équivalence biologique : Interaction avec les tissus, biocompatibilité et durée d’exposition identiques.
🔹 Équivalence clinique : Même usage prévu, même population cible et caractéristiques de performance équivalentes.

Sans accord formel de partage de données, il est interdit de revendiquer l’équivalence avec un dispositif concurrent selon le RDM.


Suivi Clinique Après Commercialisation (SCAC / PMCF)

Le PMCF est essentiel pour garantir l’exactitude continue des données cliniques. Selon l’Annexe XIV, Partie B, les fabricants doivent :

📊 Surveiller la sécurité et la performance : Identifier les tendances à long terme et les risques émergents.
📊 Collecter des données en vie réelle : Registres de patients, études post-commercialisation, suivi des événements indésirables.
📊 Réévaluer le rapport bénéfice/risque : Révision des indications, notices, ou des stratégies de gestion des risques.

Les résultats du PMCF doivent être intégrés dans les rapports périodiques de sécurité (PSUR) pour les dispositifs de classes IIa, IIb et III.


Maintenir la conformité tout au long du cycle de vie

La conformité réglementaire impose une mise à jour continue de la documentation d’évaluation clinique. Les fabricants doivent :

✔️ Mettre à jour régulièrement le REC avec les nouvelles données.
✔️ Réévaluer le rapport bénéfice/risque en cas de signalements post-commercialisation.
✔️ Réaliser des études cliniques supplémentaires en cas de lacunes dans les preuves.
✔️ Assurer la conformité avec les exigences de surveillance après commercialisation (PMS) et de vigilance.

Un défaut de mise à jour des données cliniques peut entraîner la suspension du certificat CE, des sanctions réglementaires, voire un retrait du marché.


Foire aux questions (FAQ)

Quel est l’objectif de l’évaluation clinique selon le RDM ?
L’évaluation clinique permet de démontrer la conformité du dispositif aux Exigences Générales de Sécurité et de Performance (EGSP), en validant la sécurité, la performance et le rapport bénéfice/risque.

Tous les dispositifs nécessitent-ils une évaluation clinique ?
Oui. L’article 61 du RDM impose une évaluation clinique à tous les dispositifs, quelle que soit leur classe de risque.

Quand une nouvelle investigation clinique est-elle requise ?
Les dispositifs de classe III et certains dispositifs implantables de classe IIb nécessitent souvent des investigations cliniques, sauf si l’équivalence ou des données existantes sont suffisantes.

À quelle fréquence doit-on mettre à jour le REC ?
Pour les dispositifs de classe III et les implants, le RDM exige une mise à jour annuelle intégrant les résultats du PMCF.

Peut-on revendiquer l’équivalence avec un dispositif concurrent ?
Non, sauf si le fabricant dispose d’un accord formel d’accès à la documentation technique et que les critères d’équivalence sont pleinement respectés.

Que se passe-t-il si des problèmes de sécurité sont identifiés après la mise sur le marché ?
Le fabricant doit mettre à jour les évaluations de risques, modifier les instructions d’utilisation, appliquer des actions correctives ou retirer le dispositif du marché si nécessaire.


Conclusion

Le Règlement (UE) 2017/745 impose des exigences accrues en matière d’évaluation clinique, fondées sur une approche continue et axée sur le cycle de vie du dispositif. Les fabricants doivent adapter leurs stratégies d’évaluation clinique pour maintenir la conformité et garantir la sécurité des patients.


📌 Ressources utiles :

✍️ Rédigé par Hatem Rabeh, MD, MSc Ing
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